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Blanchir la paille, eau de Javel et eau oxygénée

Il nous a semblé pertinent de réserver une page spéciale au blanc dans le traitement tinctorial de la paille. D'abord parce que le blanc n'est pas vraiment une couleur, ensuite parce qu'il est quasiment impossible d'obtenir une paille "blanche". La paille possède d'origine une couleur jaune qui est préjudiciable aux différentes tentatives de teinture, notamment pour l'obtention du blanc.

Par contre il est possible d'altérer la couleur d'origine et d'obtenir des tons plutôt blanc cassé, ou écru, en passant par toute la gamme des beiges. Ce blanc cassé est particulièrement intéressant pour arriver à des teintes claires voire pastel en cas de mise en teinture ultérieure.

Deux procédés sont habituellement mis en oeuvre, nécessitant l'emploi d'Eau de Javel et/ou de péroxyde d'hydrogène, plus connu des élégantes sous le nom d'eau oxygénée, lesquels dégradent la couche superficielle du fétu en en détachant les particules de couleur, avec pour résultat une paille d'un ton homogène sur toute sa longueur et un éclaircissement notable de la teinte d'origine.

Mise en oeuvre :

     A- Eau de Javel

          a- Méthode

D'un maniement très délicat, elle permet, par trempage de paille de couleur naturelle, d'obtenir des parties bien blanches aux extrémités du fétu sur des longueurs de deux à trois centimètres, le reste subissant des dégradations non uniformes de couleur. Mais attention, la javel étant très agressive, la réaction se produit très vite. Utilisée pure, telle que proposée par le berlingot du commerce, vous disposez d'environ vingt minutes avant que la structure du fétu ne soit dégradée irrémédiablement. La cutine protectrice sera détruite et la paille deviendra mate, terne et se délitera au simple toucher.

Cette agressivité peut être amoindrie par dilution du produit dans l'eau. Plus la dilution sera importante, plus le processus sera ralenti et le bain pourra durer plusieurs heures. Mais en ce cas les parties blanches aux extrémités ne se produiront pas, on ne peut pas tout avoir. A contrario cette méthode permet, par exemple avec la dilution d'un berlingot du commerce dans un litre d'eau d'obtenir, à partir de pailles teintées, des fétus "délavés" dont la couleur aura perdu de façon aléatoire, par endroits, de ci de là, cahin-caha, son uniformité. Le résultat est fort intéressant, notamment pour le traitement du fond, des ciels, des sols, des vêtements etc. de vos futures marqueteries.

          b- Petits conseils 

surveillez de très près votre bain, enfilez vos gants et prélevez les pailles au plus près de vos attentes. Si le bain n'a pas duré trop longtemps, il peut resservir pour une autre série, à condition que la limpidité de l'eau n'ait pas été altérée par les particules de couleur héritées du bain précédent.

Après le bain, rincez convenablement la paille et mettez-là à sécher.

          c- Récipient

Compte-tenu de la longueur des pailles il est possible de se servir de la poissonnière familiale mais elle doit être absolument vierge de toute rouille. Si au contraire vous êtes adepte des poissons carrés de votre supermarché favori, vous pouvez utiliser une grande bouteille d'eau en plastique, vous savez, celle que les nutritionnistes auto-proclamés des grands magazines vous forcent à ingurgiter quotidiennement, conservez-en bien le bouchon à vis, et dans laquelle vous aurez découpé une fenêtre d'environ 18 cm par 8 cm au milieu du récipient en prenant soin de lui garder une certaine rigidité.

     B- Eau oxygénée à 130 vol. (30/35%)

Elle permet de délaver complètement le fétu. Les tâches disparaissent, les couleurs s'éclaircissent de façon uniforme, ce qui augmente considérablement votre palette. Etant moins agressive que l'eau de Javel (pour les pailles, pas pour les mains, attention! ça brûle!), l'eau oxygénée présente l'avantages de permettre des bains qui peuvent durer plus longtemps, sachant que la dilution dans l'eau pourra ralentir encore le processus jusqu'à deux-trois, voire quatre jours, selon les tons recherchés. Mais il faudra alors surveiller le point de saturation, c'est-à-dire le moment où le produit, épuisé, n'agira plus. Cette saturation varie selon la solution, la dureté de l'eau, la quantité de paille et sa qualité. Au contraire la limpidité du bain peut se trouver altérée au point de redonner à la paille des tons disgrâcieux, ternes, surtout dans les tentatives de blanc.

Et si la concentration de produit est trop forte, vous aurez à prendre quasiment les mêmes précautions qu'avec l'eau de Javel, ainsi qu'il est dit dans le paragraphe "Petits conseils" ci-dessus.

          a- Méthode à froid

Il suffit de préparer un bain composé d'eau oxygénée allongée d'eau du robinet en quantité à determiner selon les tons recherchés. Utilisez une solution suffisamment diluée si vous ne tenez pas à passer la nuit devant votre récipient. Ce bain peut resservir pour autant qu'il ne soit pas saturé. Veronica Main (voir dans la rubrique "Livres") préconise de tremper la paille au préalable dans de l'eau tiède pour la débarasser d'éventuelles impuretés, et bien l'égoutter avant de la plonger dans la solution avec toutes les précautions d'usage. A la fin du bain rincer abondamment et laisser sécher à plat.

          b- Méthode à chaud

Le blanchiment est plus rapide avec de l'eau oxygénée tiède. Mais attention, vous connaissez l'expression "café bouillu, café foutu", et bien c'est pareil pour notre produit qui perd son efficacité si on le fait bouillir. D'où l'expression "péroxyde bouillant, péroxyde impuissant". Dans son livre Veronica Main recommande, thermomètre en main, de chauffer la solution à 67° C, et 60°C pour Rhône-Poulenc Textiles, c'est-à-dire juste avant le point d'ébullition. Tremper les pailles, laisser mijoter un "certain temps" selon les conseils de Fernand Reynaud, rincer et faire sécher.

          c- Autres procédés

               c- 1- Eau oxygénée plus ammoniaque

Dans une solution diluée, ne verser l'ammoniaque que goutte à goutte, pas plus d'une dizaine pour un litre d'eau. Puis procéder comme ci-dessus.

1° AVERTISSEMENT : Ce mariage est le plus efficace pour blanchir la paille. Mais attention!!!! La rose à des épines! En cas de surdosage le mélange obtenu est très dangereux, la réaction chimique est des plus virulentes, provoquant de forts dégagements de fumée accompagnés de risques de flammes.

Il convient donc d'opérer avec toutes les précautions rappelées en fin d'article.

               c- 2- Eau oxygénée plus soude

Mélanger de l'eau oxygénée avec un peu de soude, par exemple du bicarbonate de soude au rendement plus faible que les cristaux de soude car très dénaturé.

Mais là encore, prudence! Ne pas dépasser une dose de soude comprise dans une fourchette de 2 à 5 %.

 

Dans tous les cas exposés, il convient de surveiller l'évolution des bains de paille pour éviter, à cause d'une trop longue imprégnation, une dégradation profonde de l'enveloppe externe du matériau. Et si l'on ne donne que peu d'indications sur les quantités de produit ou d'eau à mettre en oeuvre, c'est qu'il est pratiquement impossible de les déterminer à priori. Tout dépend de la dureté de l'eau, de la quantité de paille à blanchir, du volume disponible dans le récipient. Nous verrons dans la rubrique "Teinture" que les céréaliers spécialisés teintent par grosses quantités au coloris, dans de grands bacs. Ils ont donc la possibilité de tout peser, la quantité de paille, le volume d'eau et son pH, le poids des colorants. Ce qui n'est pratiquement pas possible avec les petits volumes pour lesquels le moindre écart de pesée aura des incidences d'autant plus importantes. Surtout que la paille, selon les circonstances de sa croissance, ne réagit pas toujours de la même manière aux agressions chimiques.

Quoi qu'il en soit, les essais personnels, appuyés sur ces conseils de base, sont encore la plus sûre façon de progresser. Rien ne remplace la politique des petits pas, l'expérimentation, les essais tâtonnants, étonnants, apeurants, excitants, performants, décevants, émerveillants, exaltants, surprenants, frappants, ébahissants, épatants, et pas tant que ça, stupéfiants (aïe! Big Brother!), saisissants, étourdissants, éblouissants, époustouflants, déconcertants, impressionnants mais parfois effrayants.

 

2° AVERTISSEMENT

Dans tous les cas, et quelles que soient les méthodes utilisées, ayez toujours présent à l'esprit que ces produits, de par leur forte concentration, sont d'un maniement extêmement dangereux, pouvant provoquer de graves lésions s'ils ne sont pas manipulés avec la plus grande précaution.

     - Travailler toujours dans un local bien aéré

     - Portez masque, lunettes, gants, vêtements de protection adaptés

     - Protégez-vous mais également les objets qui vous entourent

     - En cas d'ingestion, de contact cutané ou avec les yeux, consultez un médecin

     - Gardez les étiquettes des produits, à montrer au médecin en cas d'accident

     - Préservez l'environnement en respectant la législation en vigueur lors de l'évacuation des produits

     - D'une façon générale respectez les conseils et préconisations du fabricant

 

Bon courage les audacieux

L'approvisionnement des produits, notamment l'eau oxygénée se fera dans les magasins de bricolage.